De là où
tu es, tu sais peut-être déjà que nous avons eu l’immense honneur d’accompagner
l’original de ton petit portrait au Musée de l’Armée dans l’Hôtel national desInvalides. Après avoir bénéficié de tous les soins et de toutes les attentions,
il y est exposé dans le cadre de la grande exposition Napoléon et l’Europe qui
se tient jusqu’au 14 juillet. Tu n’as
jamais sans doute été aussi près de ton Empereur.
Cette
très belle exposition a été inaugurée ce mardi par le ministre de la Guerre,
aujourd’hui on dit le ministre de la Défense. S’il n’était pas reparti très vite après
son discours, « appelé en urgence chez le président de la République», je
lui aurais parlé de tes
arriérés de solde.
Puisqu’il semble bien que vous n’avez rien touché pendant
toute la campagne de Russie, j’ai compté 30 centimes par jour du passage du Niémen
le 24 juin à ta mort le 8 décembre.
Ce qui nous fait un peu plus de 50 francs de ton époque, un peu plus
de 328 euros d’aujourd’hui. Sans compter les suppléments de
guerre...
Mais de toute façon, nous ne pensions rien réclamer. La France n’a plus un sous.
Mais
revenons à cette vitrine dans laquelle tu te sens peut-être un peu seul. Tu aurais dû y être rejoint par un soldat du 3e
régiment d’infanterie de ligne, un Bavarois nommé Hans Huber.
Lui aussi disparu pendant la campagne de Russie. Vous auriez pu échanger
vos expériences. Mais il n’est pas
fréquentable, son cadre en bois a été attaqué, non par des cosaques, ni même
comme vous par des poux, mais par des insectes
xylophages. A ma prochaine visite, lui devrait donc se retrouver dans la
vitrine, et toi dans un beau cadre.