vendredi 25 juin 2010

En campagne en Russie

Cher Vandevoorde,
Le 24 juin, avec la Grande Armée, tu es donc entré en Russie. Vous allez ensuite passer une partie du mois de juillet à Vilna- Vilnius où les Lituaniens vous ont accueillis avec joie. Peut-être as-tu arpenté les rues de ce qui est aujourd’hui la vieille ville avec ses pavés et ses églises. As-tu goûté au plat national lituanien, les didžkukuliai, ces boulettes de pommes de terre géantes, les as-tu arrosées de Svyturys, la plus vieille bière lituanienne créée en 1784 ?
Mais il a fallu reprendre la route de Moscou, et repartir au combat. Plusieurs grandes batailles vous attendent.

Le 17 aout, Smolensk. Compte-rendu dans le 13ème Bulletin de la Grande Armée. Le premier corps était au centre du dispositif. L’attaque du faubourg de droite a été confiée par l’Empereur au général comte Morand, celle du faubourg de gauche au général comte Gudin (Charles Étienne Gudin de La Sablonnière). Le 21ème de ligne est sous les ordres de ce dernier:

«A cinq heures, les deux divisions enlevèrent les faubourgs retranchés de l’ennemi avec une froide et rare intrépidité er le poursuivront jusque sur le chemin couvert qui fut jonché de cadavres russes… jamais l’armée française n’a montré plus d’intrépidité que pendant cette campagne».


Hommage au 21ème de ligne


Le 14ème Bulletin fait de la bataille de Valoutina , le 18 août, « l’un des plus hauts faits d’arme de notre histoire militaire ». Mais ce sera la dernière pour le général comte Gudin, «atteint par un boulet qui lui a emporté la cuisse, il est mort glorieusement. Cette perte est sensible. Le général Gudin était un des officiers les plus distingués de l’armée. Il était recommandable par ses qualités morales, autant que par sa bravoure et son intrépidité».
Et l'hommage au général Gudin concernera aussi ses soldats: «La division Gudin a attaqué avec une telle intrépidité que l’ennemi s’était persuadé que c’était la garde impériale. C’est d’un mot faire le plus bel éloge du 7ème régiment d’infanterie légère, et des 12, 21e et 127ème de ligne qui composent cette division».

Enfin la bataille de la Moskova (de Borodino pour les Russes) le 7 septembre.Une fois de plus Napoléon a mobilisé ses troupes :

 « Soldats ! Voilà la bataille que vous avez tant désirée. Désormais la victoire dépend de vous ; elle nous est nécessaire, elle vous donnera l’abondance, de bons quartiers d’hiver et un prompt retour dans la patrie. Conduisez-vous comme à Austerlitz, à Friedland, et que la postérité la plus reculée cite avec orgueil votre conduite dans cette journée ; que l’on dise de vous : Il était à cette grande bataille livrée sous les murs de Moscou.»

Une «grande bataille» qui restera dans l’histoire comme une des plus sanglantes des batailles napoléoniennes. Et c’est sur ce site, au milieu des cadavres, que vous bivouaquerez après avoir quitté Moscou le 19 octobre. Dans ces Mémoires, le sergent Bourgogne racontera que cinquante deux jours après la bataille, «on voyait sortir de terre des jambes, des bras et des têtes». Et qu’avec ses camarades, ils ont eu du mal à trouver de l’eau « car la petite rivière était remplie de cadavres en putréfaction… »

L’histoire dit que Napoléon est entré dans la capitale de l’empire russe le 14 septembre. L’historique du 21ème de Ligne indique que vous êtes arrivés à Moscou seulement le 14 octobre. Avec un mois de retard ? Il doit y avoir une erreur quelque part... Quoi qu’il en soit, la période de la conquête est bien terminée, la Retraite commence, et tu es bien placé pour savoir à quel point elle sera dramatique.